
Revue stratégique d’investissement – 29 juin 20
STRATEGIE ET MACRO
Allocation d’actifs
- Un scénario rose plus probable qu’un scénario noir
- La récession de 2020 affectera profondément les économies
- Grande inconnue pour 2020-2021
- L’énorme dette et les déficits ne sont pas encore un problème
- Les actifs risqués considèrent la pandémie comme temporaire
- Les actions soutenues par la liquidité sont en avance sur les fondamentaux
- Les obligations souveraines toujours en mode crise
Une fois de plus, le raz de marée des liquidités des banques centrales a jugulé la volatilité et rétabli le bon fonctionnement du marché des capitaux. Par conséquent, les actifs risqués, qu’ils s’agissent des actions, des obligations à haut rendement et, dans une certaine mesure, du pétrole, ont rebondi. Ils escomptent implicitement une crise sanitaire contenue (en 2020) et une reprise décente, voire une normalisation pour 2021 et au-delà. La courbe des taux américains s’est progressivement repentifiée.
Mais sous la surface, les choses restent beaucoup plus complexes. La participation des investisseurs est restée limitée. En effet, la mauvaise visibilité a entraîné d’importantes sorties de capitaux dans les ETF à haut rendement et actions ainsi que des fonds communs de placement. Des tonnes de liquidités ont été laissées de côté dans les fonds monétaires. L’or reste – anormalement – positivement corrélé au dollar.
Les premiers signes de FOMO (fear of missing out/peur de passer à côté) émergent à nouveau
Nous maintenons notre allocation inchangée
Perspectives macro
Les pandémies changent la donne économique
L’activité mondiale a été placée dans un coma artificiel pour une durée indéterminée, espérons-le courte… Les pandémies renforcent le découplage économique et les déséquilibres. Elles accroissent l’incertitude, les inégalités et la précarité. Elles pénalisent principalement les bas salaires. Il s’agit d’un choc majeur d’une ampleur sans précédent. Il affecte séquentiellement les différents continents. D’abord l’Asie, puis l’Europe et les États-Unis, et maintenant les pays émergents. Il touche particulièrement les services, autrefois plus résistants. Les industries à forte intensité de main-d’oeuvre risquent d’être durablement affectées, voire victimes d’une accélération de l’automatisation et de la robotique. L’incursion brutale de l’État, en tant qu’ultime sauveur, annonce un revirement majeur après des décennies de mondialisation, de déréglementation et de financiarisation. C’est en résumé l’avis « consensuel » de la plupart des économistes et des administrations en place en ce moment …
Certes, la pandémie laissera des traces profondes, sinon modifiera en partie « l’évolution de la civilisation ». La mondialisation, l’urbanisation et le commerce vont subir d’importants revers. Les chaînes d’approvisionnement, les migrations de main-d’oeuvre et les flux d’investissement pourraient également être gravement perturbés. La productivité et la création d’emplois dans les zones côtières à forte densité de population risquent d’être durablement affectées. Mais que se passerait-il si un vaccin émergeait au S2 2020 ? Est-ce que tous / certains des changements structurels susmentionnés continueraient, en pratique ? Ou bien, le monde va-t-il plutôt « revenir » à l’ancien modèle économique, avec certes des cicatrices et une restructuration douloureuse ?
La récession affectera profondément les économies mondiales
Mais il est trop tôt pour envisager un changement structurel et irréversible du modèle économique
Entre prodigalité et frugalité
Jamais auparavant nous n’avions connu de stimuli conjoints – fiscal et monétaire – d’une telle ampleur sur une si courte période. Les presses monétaires surchauffent. Les banquiers centraux sont devenus les apprentis sorciers de l’ingénierie financière moderne. Les administrations en place franchissent quotidiennement les lignes de l’impensable. Le pacte de Maastricht est mort et l’Europe envisage même la mutualisation des risques / euro-obligations ! Le fonds de relance « Recovery » (de 750 milliards d’euros) consacre le moment de vérité pour l’UE. Un sommet décisif aura lieu en juin. Espérons qu’A. Merkel entrera enfin dans l’histoire en tant que sauveur européen… Une valse de trillions de dollars est en cours au Congrès américain. Au total, on parle de près de 14% du PIB américain. De plus, le Congrès discute d’une prochaine phase de secours économique. Cette phase « 4 » pourrait inclure des fonds supplémentaires pour les États et les municipalités, un programme pour les petites entreprises (le Paycheck Protection Program) et plus de relance pour les particuliers. Il pourrait avoisiner 1 à 1,5 trillion de dollars. En Chine, la relance budgétaire a grimpé à environ 16% du PIB, soit 5% de déficit budgétaire et 6% au travers d’obligations d’État spéciales. Certes l’impulsion budgétaire devrait ajouter jusqu’à 5 points de pourcentage au PIB, mais les effets multiplicateurs pour les entreprises et les ménages sont limités. Il n’y a pas un seul politicien assez suicidaire pour contester que la fin justifie les moyens ?
Oublions l’austérité, vive la prodigalité !
Les éventuelles conséquences et la facture viendront plus tard
Choc psychologique
Le chômage en plein essor – aux États-Unis – et le confinement provoquent un choc psychologique majeur pour les consommateurs. Il pourrait en résulter un taux d’épargne structurellement plus élevé. La distanciation sociale ajoute au problème, en réduisant mécaniquement le niveau d’activité, indépendamment de la force de la demande potentielle. Très peu de secteurs pourront augmenter suffisamment les prix pour défendre leurs marges.
Dans l’ensemble, l’activité mondiale devrait suivre une reprise en U au second semestre 2020
Les aides publiques éviteront qu’une déflation corrosive ne se transforme en dépression
Expansion en 2021 : la grande inconnue
Allons-nous vivre des répliques de crises sanitaires ? De quelle ampleur, de quelle durée ? De nouveaux confinements seront-ils imposés, alimentant les risques de dépression ? Ou, si un vaccin émergeait, allons-nous plutôt connaître une demande refoulée importante, une hausse des prix des matières premières et la résurgence d’une inflation cyclique ? Sans oublier tous les scénarios intermédiaires / hybrides.
L’Asie, notamment la Chine, semble contrôler le Covid-19. L’activité s’accélère, un processus de restockage a débuté pour les entreprises, tandis que les consommateurs effectuent des achats de rattrapage. Des déconfinements progressifs sont en cours en Europe. L’humeur extrêmement prudente des décideurs politiques et des citoyens se dissipe. Peu à peu, même les pays les plus touchés s’ouvrent. Les États-Unis sont quelque peu en retard, tout en essayant de s’ouvrir assez rapidement. Dans les émergents, le Brésil, l’Inde et la Russie sont dans une situation précaire, compte tenu de la pauvreté, du développement inférieur de leur système de santé, de la très forte concentration urbaine et d’une réaction tardive à l’infection. Environ la moitié de l’humanité restera sous un certain degré de verrouillage en 2020 au moins.
L’expérience tragique des derniers mois laissera des traces et changera les comportements. Les masques, la distanciation sociale et les gestes protecteurs empêcheront une nouvelle épidémie de se produire avec la virulence qui prévaut, contrairement à la surprise, au déni et à la réaction lente du T1 2020. Les pandémies accélèrent l’intégration de la technologie dans notre vie quotidienne. Les achats en ligne, les lieux de travail virtuels et les vidéoconférences sont devenus indispensables. Dans les principales économies, les estimations de l’utilisation d’Internet ont augmenté de 40% depuis le début de l’année, en particulier dans les secteurs de la vente au détail, de l’éducation, des soins de santé, des loisirs et du divertissement.
DEVISES
Le dollar perdra du terrain
L’USD conserve encore une partie des gains liés à la recherche d’actifs défensifs au début de la pandémie. Et bien qu’il puisse rester ferme à court terme – en particulier compte tenu de la reprise des tensions avec la Chine – l’USD cédera lentement du terrain cette année. Ayant été un des gagnants lorsque les craintes de la pandémie étaient à leur comble, l’USD peut facilement perdre du terrain.
Le moment de l’Euro
Une politique monétaire accommodante, alliée à des dépenses budgétaires en hausse, comme le rebond allemand devrait fournir un contexte plus constructif à l’euro. La proposition franco-allemande d’un fonds de sauvetage de 500 milliards et le plan de relance fiscal de l’UE de 750 milliards changent la donne. Tous les principaux acteurs européens soutiennent apparemment le plan, et l’Allemagne a reconnu tardivement que le conservatisme budgétaire n’était plus approprié. Le soutien budgétaire devrait réduire la dépendance à l’égard des taux d’intérêts négatifs à moyen terme, aidant l’EUR à revenir vers le milieu de sa fourchette de long terme et les 1,16.
Un sentiment haussier trop extrême sur le CHF
Le positionnement sur les devises met en évidence une net changement sur le CHF. Le CHF est nettement surpondéré parmi les devises du G-10 (+ 23% de la position ouverte). Ce changement montre comment les marchés parient de plus en plus sur la possibilité que la banque nationale suisse cesse de défendre le taux plancher psychologique des 1,05 sur l’EUR/CHF. À coup sûr, il sera compliqué pour la BNS de faire face à l’expansion du bilan de la BCE. Cependant, la plupart des nouvelles sont déjà dans le prix.
Les devises émergentes auront du mal à regagner du terrain
Les pays émergents deviennent l’épicentre de la pandémie. Quatre pays émergents (Russie, Brésil, Turquie et Iran) figurent désormais parmi les 10 premiers pays avec le plus grand nombre de cas confirmés. La situation reste très fragile. Ces pays étaient déjà confrontés à de nombreux défis structurels et politiques. Nous restons prudents en ce qui concerne les devises émergentes. Pour devenir plus positif sur ces devises, nous devrions voir certains signes durables de retour de l’économie mondiale à la normale, ce qui semble peu probable avant le S2 2020.
Les institutions mobilisent les outils politiques disponibles pour atténuer le contrecoup porté à leurs économies. La combinaison de réponse budgétaire et monétaire varie beaucoup d’un pays à l’autre selon leurs moyens. Les mesures de stimulation prises par les pays émergents nous rendent sceptiques quant aux perspectives à court terme sur les devises émergentes. La reprise économique après la pandémie s’annonce très progressive et les risques géopolitiques restent élevés.
Les pays émergents ayant les taux directeurs les plus bas ont été les plus dépensiers, l’augmentation de la dette étant plus gérable. Les plans de relance dans les pays émergents ont été souvent nettement plus limités que dans les pays développés.
OBLIGATIONS
Un bear steepening positif ou négatif
Après des mois d’aplatissement de la courbe des taux, de 2014 à 2019, la courbe des taux se pentifie à nouveau. Les taux courts resteront durablement bas. La Fed s’est engagée à soutenir, par tous les moyens, l’économie. Cependant, Powell a clairement rejeté l’idée de taux négatifs. Les taux longs seront poussés à la hausse.
Traditionnellement, un bear steepening (des taux longs remontant plus vite que les taux courts) est un signe soit de croissance et/ou d’accélération de l’inflation, soit d’une indigestion de nouvelles émissions.
Le 1er scénario est le meilleur, la Fed maintenant ses taux inchangés et le marché anticipant des taux d’intérêt futurs plus élevés.
Le 2ème scénario est plus inquiétant et pourrait être la raison pour la Fed d’envisager un contrôle de la courbe des taux (YCC).
Normalement, une augmentation du volume d’émission d’obligations d’État déclencherait une forte hausse des taux longs. La hausse des taux dans une économie fragile serait préjudiciable au renouvellement des dettes des entreprises et pourrait heurter l’économie. Ainsi, la Fed devrait rester impliquée. Les investisseurs traditionnels ne pourront absorber un si grand volume d’émission. Les énormes programmes de QE contrebalanceront l’offre d’obligations d’État. Selon les données officielles, les achats de la Fed dépasseront les émissions du Trésor de 900 milliards d’ici fin de l’année. L’offre ne devrait pas être une source de stress.
Si la Fed réagit à un bear steepening, elle pourrait utiliser le Yield Curve Control. Il serait plus efficace que le QE. Le Japon fait cela depuis des années et l’Australie l’a adopté en mars. La Fed aurait plusieurs options comme fixer un niveau de taux sur une maturité spécifique, comme le 2 ou 3 ans. Alternativement, elle pourrait cibler un certain niveau pour la pente de la courbe des taux.
Une fois que l’économie se portera mieux que prévu, les taux longs auront tendance à bondir. Cela peut se produire comme lors du Taper Tantrum de 2013, lorsque les taux ont grimpé de 110pbs en seulement 6 semaines et la courbe s’est pentifiée de 90pbs. Pour l’instant, la Fed a déjà réduit ses achats quotidiens de bons du Trésor à 6 milliards contre 75 milliards sans aucun impact significatif sur le marché. La présence de la Fed à elle seule plafonne les taux.
Le contrôle de la courbe des taux ne sera pris en considération que si l’émission de bons du Trésor devient hors de contrôle
Le marché du high yield passe la surmultipliée
Le taux de défaut du high yield US atteindra 5,5% ce mois, en hausse par rapport aux 4,2% d’avril, son plus haut niveau depuis 2010 tiré par la faiblesse des secteurs de l’énergie et du commerce de détail. Le marché a déjà intégré ce ralentissement en début d’année.
La demande est à nouveau présente
Les 4 plus grandes économies de la zone euro 4 ont déjà syndiqué des nouvelles dettes pour près de 85 milliards d’euros cette année dans un contexte compliqué. La demande lors de la dernière émission d’obligations de l’Etat français à 20 ans a dépassé les 56 milliards pour une taille d’émission de « seulement » 8 milliards.
Les nouvelles émissions high yield en mai ont atteint 35 milliards après un record proche de 38 milliards en avril. Les émissions notées BB représentent 60% des nouvelles émissions en 2020, contre 42% l’an passé. En moyenne, la demande a surpassé de 3 fois l’offre.
Une année de dégradation record sur les EM, la 3ème fois depuis 2000. Le nombre record de dégradations des dettes souveraines cette année ne s’est pas traduit par des montants records, 22 pays émergents ont été rétrogradés soit 7’400 milliards de dollars ou 10% du marché mondial de la dette publique. La plupart de ces dégradations sont intervenues dans les catégories inférieures, 17 étaient notées B ou moins pour moins de 3% du marché.
Sur les 12 derniers mois, la dette souveraine des pays émergents dégradée totalise 4’000 milliards ou 23% de la dette souveraine émergente, contre un pic de 4’700 milliards en 2016. La crise du début des années 2000 a impliqué un montant beaucoup plus faible. Cependant, l’ampleur relative des 2 précédentes crises s’inverse lorsque l’on compare la part de l’encours de la dette dégradée. Au début des années 2000, l’Argentine, le Brésil, la Colombie, l’Inde, le Pérou, la Turquie et le Venezuela ont tous été rétrogradés, soit 60% du marché de la dette souveraine émergente. La crise de 2016 avait touché plus de pays, mais dans une moindre importance l’encours de la dette émergente, soit 36%. Cependant, cette année, parmi les 15 plus grands débiteurs émergents, seuls l’Argentine, le Mexique et l’Afrique du Sud ont été rétrogradés.
Toujours pas à la mode
ACTIONS
Un rebond classique des bourses
Le schéma du rebond actuel est similaire à ceux des précédentes fortes corrections, comme 2003 et 2009 : après un pic de volatilité et de panique, les indices ont violemment rebondi, puis ils ont consolidé, pour repartir actuellement à la hausse. Le début du rallye, le 24 mars, coïncidait avec l’intervention massive des banques centrales et des Etats. La hausse actuelle des indices s’inscrit dans les déconfinements nationaux progressifs et l’ouverture des frontières, un processus nécessaire avec la proximité des vacances d’été pour éviter des faillites en nombre dans les trois principaux pays européens du tourisme, France, Italie et Espagne.
Les bourses ne semblent pas craindre une 2ème vague du coronavirus. Mais viendra-t-elle, sachant qu’en 2003, le SRAS CoV-1 avait disparu en juin tout d’un coup, sans prévenir ? Et si une 2ème vague devait arriver, forts de leurs expériences et du matériel (tests, masques, …), les gouvernements réagiraient de manière différente : fin des confinements stricts pour des raisons sociales, économiques et financières, mais des stratégies de clusters.
Nécessité d’une reprise rapide des profits au T4 2020 ou au T1 2021
Les évaluations boursières se trouvent à des niveaux équivalents à ceux des rebonds de 2003 et 2009, soit dans la fourchette de 17x à 20x les profits historiques. Mais il faut que les anticipations de reprise économique et des profits se concrétisent au 2ème semestre 2020. Certains secteurs, comme l’automobile, devraient connaître une reprise en V. D’autres où la distanciation sociale est importante, comme la restauration et le transport aérien, devraient plutôt avoir des démarrages par palier.
L’expansion des multiples s’observe lorsque la FED injecte des liquidités (QE). Elle a déployé un programme de près de $4’000 milliards et elle pourrait faire plus si nécessaire. Donc les banques centrales sont bien présentes et on sait que depuis la crise financière de 2008, il est difficile de lutter contre elles.
Les GAFA contre le reste du monde
On cherche à opposer les blue chips aux petites et moyennes capitalisations boursières. Si l’on regarde la performance du S&P 500, on serait tenté de revenir sur des valeurs plus petites et domestiques, représentées par exemple dans le Russell 2000 aux Etats-Unis. Mais si l’on prend le S&P 500 Equipondéré (toutes les positions à 0.2%), la performance est identique à celle du Russell 2000. La conclusion : les valeurs GAFA (FAANG en anglais) expliquent la totalité de la surperformance du S&P 500.
Microsoft, Apple, Amazon, Alphabet et Facebook comptant pour 20% du S&P 500, il est difficile d’éviter ces valeurs, sachant qu’une partie importante de la gestion des fonds et ETF est passive. La qualité de ces groupes, avec leurs gigantesques liquidités, n’est plus à démontrer. Toute-fois, dans des phases de reprise économique, les segments des petites et moyennes sociétés et value/cyclique ont tendance à surperformer.
Les US et le Japon ont surperformé l’Europe dans cette reprise grâce aux importants plans de soutien fiscaux et monétaires. L’Europe a aussi été pénalisée par son manque de solidarité, de coordination et des divergences Nord-Sud, une fois encore serait-on tenté de dire ! Mais le plan franco-allemand de € 750 milliards, soutenu par une dette européenne mutualisée, est un pas significatif pour un retour de la confiance sur les actifs européens.
Nous revenons donc plus positifs sur les actions européennes qui ont un profil global plus value/cyclique que la bourse américaine dominée par les valeurs de croissance (GAFA). En 2020, le S&P 500 et le Nikkei ont reculé de 7% et l’Euro Stoxx de 20%. Il existe donc un potentiel de rattrapage pour l’Europe.
En termes d’évaluations boursières, l’Europe nous paraît plus attrayante à 18x les profits 2019. Le Japon est plus cher à 24x. Sur les 9 dernières années, la moyenne du PER se situe à 18x pour le S&P 500 et l’Euro Stoxx, et à 20x pour le Nikkei.
Notre allocation sur les actions suisses est neutre. Le Swiss Performance Index a surperformé les autres indices en 2020 grâce à sa composante défensive (Nestlé, Roche et Novartis), mais les évaluations boursières commencent à devenir chères. On privilégie le segment des petites et moyennes sociétés qui est en retard en termes de performances et d’évaluations boursières.
Les réductions des programmes de rachat d’actions et des dividendes ne sont pas un problème
En 2018 et 2019, deux moteurs des bourses ont été les programmes de rachats d’actions et les dividendes. Les rachats d’actions ont compté pour 20% de la hausse des bénéfices par action du S&P 500. En 2020, ils seront évidemment moins présents, aux Etats-Unis, en Europe et au Japon, soit contraints par les gouvernements suite aux aides étatiques, soit de manière volontaire pour conserver des liquidités.
En 2020, le recul significatif des rachats d’actions et des dividendes ne sera pas perçu négativement. Il n’est pas lié à une mauvaise gestion des entreprises, mais à un facteur extérieur incontrôlable. Il est plutôt perçu comme une gestion saine pour garder des liquidités en période de crise.
Profitez de l’été !
Malgré le rallye, les investisseurs ont beaucoup de liquidités. Depuis le mois de février, ils sont sortis régulièrement des fonds/ETF investis en actions pour aller dans les produits monétaires. Avec les perspectives d’amélioration de l’économie, on devrait observer des entrées nettes dans les produits actions.
Nous serons peut-être plus prudents en septembre. A la sortie des vacances, un chômage élevé pourrait générer des tensions sociales et anéantir les anticipations d’une forte reprise économique. Les perfusions fiscales et monétaires devraient ralentir cet automne, une tendance défavorable aux actions, surtout après un puissant rebond. Puis, la période septembre-octobre-novembre est souvent volatile et caractérisée par quelques fameuses corrections. Sans compter les tensions Etats-Unis-Chine et des dérapages dans la campagne présidentielle américaine.
Les actions chinoises souffrent des guerres engagées par l’Administration US
Commerciale, technologique, financière, ces guerres ont un impact sur les actions chinoises ; elles sous-performent. La décision récente du Parti communiste de promulguer une loi sur la sécurité à Hong Kong remettant en question le principe « Un pays, deux systèmes » va se traduire par des sanctions américaines et européennes. Hong Kong va perdre son statut de centre financier et cela va probablement affecter les actions H. La nouvelle guerre financière va rendre la cotation des titres chinois sur les bourses américaines plus compliquée. Après le scandale de Lufkin Coffee, les sociétés chinoises cotées aux US vont devoir passer des audits sérieux. Pour tendre encore plus les relations sino-américaines, les Etats-Unis vont signer une loi pour sanctionner les abus chinois dans les camps d’internement du Xinjiang, regroupant des milliers de musulmans ouïgours.
Par contre, la faible pondération des titres chinois dans les indices globaux et l’autoritarisme du gouvernement central sur les bourses domestiques se traduisent par une faible corrélation des actions chinoises par rapport aux principaux indices mondiaux.
Les faiblesses de la Chine, les pressions sur le multilatéralisme, le nationalisme, le rapatriement des lignes de production des pays émergents vers les pays développés et la baisse des prix des matières premières sont des éléments qui ne plaident pas en faveur des actions émergentes dans leur ensemble.
MATIERES PREMIERES
Détention d’or dans les ETF à des niveaux records
Au 1er trimestre 2020, la demande d’or dans la joaillerie a chuté, l’Inde et la Chine comptant pour 20% chacune, en raison des confinements et de la hausse du prix de l’or, mais elle a été compensée par les achats massifs des investisseurs dans les ETF. Les banques centrales ont augmenté leurs achats nets par rapport au 4T19 et au 1T19. La Russie a annoncé qu’elle allait stopper ses achats d’or. La Turquie a contribué pour la moitié des achats des banques centrales au 1T20.
La récente faiblesse des cours coïncident avec un optimisme retrouvé sur la croissance économique, les annonces de déconfinements et d’ouvertures des frontières, ainsi que le retour des investisseurs sur des actifs plus risqués comme sur les secteurs cycliques.
Cette consolidation de l’or pourrait durer durant l’été, pour retrouver à notre avis des couleurs dès septembre, lorsqu’on aura une vue plus précise de l’impact de la pandémie et de la vitesse du reflux du chômage aux Etats-Unis.
Pétrole, vers un retour progressif à l’équilibre offre-demande
Comme attendu, la demande de pétrole a chuté de 23% en avril. Cela sera probablement le point bas de ce cycle pandémique.
Quant à l’offre, elle va diminuer. A fin avril, la baisse était due à la réduction de la production aux Etats-Unis. Ensuite, selon l’accord au sein de l’OPEP+, on assistera à une réduction drastique de 10 millions de barils/jour en mai et en juin, puis 8 millions jusqu’en décembre 2020 et 6 millions entre janvier 2021 et avril 2022. L’OPEP espère que le Canada, la Norvège, le Brésil et les Etats-Unis feront également un effort en réduisant leur production de 5 millions de barils/jour. On escompte donc une situation équilibrée déjà en juillet, autour des 90 millions de barils/jour pour l’offre et la demande et un prix du Brent entre $35-$45 en septembre.
Le pétrole de schiste US se porte mal. Au 1T20, les 39 plus grands groupes indépendants ont annoncé $26 milliards de pertes et $38 milliards de correctifs de valeur, préfigurant une vague de faillites.
On concentrera les investissements sur les grandes compagnies, même si Royal Dutch Shell a lancé le processus de réduction des dividendes pour financer la transition écologique. BP et Total vont suivre. Mais le secteur de l’énergie n’est plus un sujet de préoccupation, lui qui ne compte plus que pour 3% du S&P 500 contre 30% en 1980 !
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